L'Oisans est une région des Alpes françaises qui s'étend sur la haute et moyenne vallée de la Romanche et qui englobe les montagnes qui l'encadrent (notamment les massifs de la Meije et du Pelvoux).
L'Oisans est situé, pour sa majeure partie, en Isère et dans les Hautes-Alpes pour la partie supérieure du cours de la Romanche. La capitale en est Bourg-d'Oisans, petite ville charmante sise au milieu d'une large plaine horizontale, témoin d'un ancien lac, à environ 45 Km au SE de Grenoble.
C'est un pays de hautes montagnes, parcourues d'accidents gigantesques, aux vallées profondes et abruptes parfois sauvages, scultées par l'érosion glaciaire, avec des crètes et des pics vertigineux découpés souvent dans des roches cristallines.
L'évolution de l'humanité étant liée à la capacité de l'Homme à utiliser les ressources de la nature, les minéraux et les roches ont été de tous temps indisociables de l'activité humaine. On peut même dire, à la base de cette activité. L'Homme a en effet appris à les utiliser pour se confectionner des outils, des armes ou des ornements.
Les prémices de la métallurgie (cuivre, or, argent) ont vu le jour au Proche-Orient probablement dès le Néolithique (âge de la pierre polie). Dans les Alpes, cet art a dû arriver bien plus tard. L'Homme a su apprivoiser le cuivre à l'état natif qu'il exploitait en surface par des grattages. L'âge du bronze a vu le développement de l'exploitation des affleurements pour une utilisation de plus en plus importante : bracelets, poignards, épées... Le bronze étant constitué d'un peu d'étain mélangé au cuivre. L'exploitation du plomb argentifère a sans doutes débuté dès 1200 avant Jésus Christ, un peu avant l'âge du fer : 1000 avant JC.
Un peu de géologie
En Oisans, les minéralisations d'où l'Homme a su tirer les métaux nécessaires aux développements de son activité au cours des âges, correspondent à des filons de types hydrotermaux qui renferment les minerais de cuivre, fer, plomb, zinc, argent, or, etc... Ces filons se mettent en place lors des intrusions d'origine plutoniques qui accompagnent la formation des chaînes de montagne. Ces intrusions proviennent de la fusion de matériaux en base de la croûte à une profondeur d'environ 10 Km au niveau d'une collision continentale (fusion des roches à cause de l'augmentation de pression liée à l'épaississement crustal). Ces "bulles" de magma dont la densité est plus faible que celle des roches qui l'entourent remontent vers la surface jusqu'à se retrouver en un point d'équilibre où elles se stabilisent et cristallisent en se refroidissant. Ces remontées en force créent des fracturations dans la roche encaissante, et pendant la cristallisation lente des magmas qui donnent des granites, des fluides riches en éléments résiduels circulent dans les fractures périphériques. Ces éléments forment les minerais qui sont enfermés le plus souvent dans une gangue de quartz ou de barytine.
On comprend donc que la localisation des filons soit aléatoire, tout en étant centrée sur un site (l'intrusion granitique) et que l'orientation, l'épaisseur, la longueur et la ramification des filons ainsi que leur contenu soit très variable. N'oublions pas que les Alpes sont une chaîne de collision encore en activité et que des mouvements tectoniques continuent de l'affecter, modifiant du même coup l'allure des filons. Tout ce bel ensemble est recoupé par des vallées au profil parfois très tourmenté et c'est à la surface de ce relief que l'Homme a pu découvrir les minerais tant convoités. D'où les très grandes difficultés qu'il a eu pour les comprendre et les exploiter au cours des siècles (et même des millénaires).
Origine de l'occupation de l'Oisans par l'Homme
Quelle idée saugrenue a bien pu traverser l'esprit des anciens pour venir habiter ces lieux inhospitaliers, au fond de vallées étroites et peu ensoleillées, ou sur des coteaux abruptes et ventés, enneigés tout l'hiver et manquant parfois d'eau en été, loin des plaines verdoyantes de la basse vallée de l'Isère ?
Ces montagnes furent dabord un refuge pour les peuplades primitives ou pour les barbares entre deux invasions. Les conditions difficiles tournaient alors à leur avantage et ils expoitèrent les minéraux pour se confectionner des armes.
Puis, lors du formidable essor de l'empire romain, ces montagnes devinrent lieu de passage, difficile mais court entre la France et l'Italie (par les cols du Lautaret et du Montgenèvre). Les Romains qui connaissaient déjà fort bien l'exploitation des minéraux, ne se privèrent pas d'installer des exploitations le long de la voie romaine et ainsi de rapatrier des richesses supplémentaires vers Rome. On sait qu'ils y ont exploité le cuivre et le fer mais aussi l'argent et l'or.
Chronologie
Les premières peuplades apparaissent en Oisans à la fonte des grands glaciers. Il n'y a pas de matières premières pour fabriquer des outils (pas de silex), d'où l'intérêt pour la métallurgie.
C'est l'époque des Allobroges qui fondèrent notamment Vicenna (Vienne) et Cularo (Grenoble). Ce sont surtout des agriculteurs. Les tribus d'Oisans sont des Ucenis.
Les invasions sont difficiles par les Alpes. Ils s'engluent dans les vallées étroites, harcelés par les Allobroges alliés avec les Arvernes. Ceux-ci sont enfin vaincus en 121 et 122. Les Romains ne considèrent dabord l'Oisans que comme un simple lieu de passage et c'est sans doutes pour cela qu'on ne retrouve pas en Oisans de traces de grands travaux miniers romains comme on en trouve ailleurs, comme en Espagne notamment. Mais ils profitent tout de même des richesses minières de la région "au passage". Soufre d'Uriage, fer de la Basse Romanche et d'Allevard et peut-être plomb, cuivre, argent du Grand-Clos, de l'Argentière-la-Bessée et de Brandes près de l'Alpes d'Huez où ils avaient établis un fortin sur la voie romaine.
Lors de la décadence de l'Empire Romain au IV ème siècle, ce sont les Lombards (V ème s.) puis les Sarrazins (VI ème s.) qui envahissent par le sud. Les Sarrazins ont occupés longuement la région et plus généralement tout le SE de la France et ont eu le temps de mettre des mines en exploitation (plomb, cuivre, fer et argent). On retrouve les traces de cette occupation dans certains noms des Alpes (ne serait-ce que la Maurienne).
Les Sarrazins seront chassés en 739 par l'armée de Charles Martel, allié aux Lombards pour repousser "l'infidèle".
Au XIV ème s., l'Oisans fait partie du Dauphiné. Les mines d'Oisans connaissent un fort développement : Brandes (argent), Saint-Christophe en Oisans (argent), Villard d'Arène (plomb, cuivre), Venosc (plomb, fer, charbon), Cuculet, Mont-de-Lans (cuivre, charbon), Ornon (plomb, argent, ardoises), Bourg-d'Oisans (plomb), Combe de Malleval (plomb), Alpette (plomb argentifère, cuivre), Petites Rousses (cuivre), La Garde, Livet, L'Armentier (cuivre et fer), Eau d'Olle et Articol (fer et plomb).
Les mines d'Oisans sont la proie des spéculations au XV ème s., les mines changent de mains, mais petit à petit les exploitations ralentissent.
C'est le réveil industriel, l'Oisans voit la réouverture de ses sites miniers pour quelques temps.
En 1717, un paysan de Villard-Notre-Dame découvre par hasard l'or de La Gardette.
L'exploitation du cristal de roche se développe, maintenant l'activité pendant un temps en Oisans.
De multiples tentatives n'amènent pas de véritables productions et surtout pas les immenses richesses convoitées.
L'eldorado d'Oisans a vécu.